Article publié le 15/04/2018 dans
Valorisation des prairies
Vente directe

Nicolas Paillier à Gourgé (Deux-Sèvres) produit de la viande ovine et bovine 100 % à l’herbe, bio et vendue en direct. Un défi à la sécheresse que conjure l’éleveur avec sa gestion fourragère optimisée, mais qui l’astreint cependant à mettre des oeufs... dans le même panier.  

L'exploitation

Installé depuis 2001 a Gourgé (79), Nicolas Paillier élève actuellement 450 brebis (Charmoise et croisement Vendéenne-Texel) et 10 vaches Parthenaises couplées avec un taureau Angus, nourries exclusivement d’herbe pâturée sinon enrubannée (123 ha). L’éleveur privilégie une croissance lente au service d’une viande fine et gouteuse.  

Le passage en bergerie est limité aux agnelages (trois semaines) et aux épisodes de chaleur (avec parcours). L’éleveur emploie un salarié et consacre en moyenne 2 jours par semaine à la vente de ses produits (et ceux de ses associés) dans leurs deux magasins Plaisirs Fermiers de Niort. Une enseigne gagnante qui a inspiré d’autres agriculteurs des Deux-Sèvres et de la Vienne.  

Nicolas Paillier, Exploitant à Gourgé  

Ajouter des oeufs dans le panier de ses clients pour éviter d’avoir tous ses oeufs dans le même : tel est l’adage quelque peu revisité par Nicolas Paillier en cette année 2018. Depuis 2012, l’éleveur réussissait le tour de force d’élever 650 brebis et 15 vaches allaitantes sur une surface tout en herbe de 123 ha, sans un grain de céréale. Mais deux sécheresses consécutives ont fini par pointer la fragilité de son système.  

« Je me savais à l’abri des fluctuations des cours de la viande mais exposé au risque de sécheresse », analyse-t-il. « Pour diversifier mes revenus sans dépendre de la météo, j’ai mis en place un atelier de 250 poules pondeuses à partir d’une cabane mobile réhabilitée ». Le débouché est tout trouvé : comme la viande ovine et bovine, les oeufs bio seront commercialisés dans les deux magasins Plaisirs Fermiers de Niort (Deux-Sèvres), que l’éleveur et huit autres agriculteurs associés ont créés il y a quelques années. « Ce sont les clients qui m’ont suggéré cette diversification, aucun des associés ne produisant des oeufs bio ».  

Pas d’herbe, pas de poids  

Le contact direct avec les clients consommateurs a décidément du bon. Cependant, l’élevage ovin et bovin continuera de garnir l’essentiel du panier et du revenu.

En réaction à la sécheresse, l’éleveur a préféré alléger ses effectifs plutôt que d’acheter du fourrage extérieur, contraire à sa démarche. L’effectif est tombé à 450 brebis et 10 vaches. Moins d’animaux, moins de poids : la rentabilité, jusque-là excellente, en a évidemment pâti. Nicolas Paillier en a tiré quelques leçons, pour mieux prévenir les prochains épisodes secs. « J’aurais dû décharger dès le mois d’août et ne pas attendre octobre. Je vais également réviser à la baisse mon effectif de brebis tout en essayant de conserver ma productivité. En revanche, je vais relever mon effectif de vaches car en situation d’urgence, les vaches se valorisent mieux que les brebis ».  

Trois types de prairies  

La production fourragère recèle peut-être aussi quelques leviers d’action, même si le système 100 % herbager ne laissait guère de place à l’approximation. La ferme de Sauvigny fait cohabiter trois types de prairies : des permanentes sur les terres pauvres, des temporaires renouvelées tous les 5 ans à base de 15 kg RGA 5 kg de prota+dry (chicorée, trèfles blancs) et 1.5 kg de plantain) et des temporaires de 3 ans à base de 5 kg de prota+ dry, 5 kg de trèfle violet et 3 kg de plantain. « Ces dernières sont réservées aux animaux en croissance, c’est à dire les agneaux, aux vaches en lactation et à l’engraissement », explique Nicolas Paillier. « Elles servent aussi le flushing des brebis avant de les mettre au bélier ».   

L’éleveur pratique le pâturage tournant, qu’il s’apprête à revisiter pour les brebis et vaches allaitantes, en s’inspirant d’une technique canadienne. « J’ai testé un retour sur 31/ 35 jours au lieu de 18/21 jours en période de pousse, avec une conduite en un lot au lieu de deux », indique l’éleveur. « Cette technique semble être plus résiliente à la sécheresse. Elle a pour effet de créer un mulch en hiver, sous l’effet du broyage des refus, limitant l’évapotranspiration et propice au sursemis. Il faut davantage de temps pour finir les animaux mais dans mon système, si je suis dépendant du temps qu’il fait, je le suis moins du temps qui passe ». Le pâturage tournant sur les prairies engraissement resteront autour des 18 jours.