LA PRAIRIE POUR NOURRIR LES HERBIVORES 

Les systèmes fourragers de « type herbager » valorisent des prairies permanentes, temporaires et artificielles, composées de graminées et /ou de légumineuses fourragères.
Le pâturage est en France, une pratique très fréquemment utilisée dans beaucoup de systèmes, quelques exploitations ont recours à l’affouragement en vert.
Le foin reste un mode de stockage omniprésent.
L’herbe fauchée enrubannée, qui apporte une sécurité de récolte, une simplicité de chantier et un stockage facile, est très utilisé.
L’ensilage d’herbe est également un moyen de stocker son fourrage.

Le recours au séchage des fourrages récoltés par ventilation est réservé aux élevages laitiers très spécifiques car il engendre des investissements importants valorisés par une très bonne qualité de fourrage.

La notion de chargement correspond au nombre d’animaux affectés par un éleveur à une parcelle ou un groupe de parcelles au cours d’une période donnée. Ce critère est exprimé en UGB/Ha. Cette notion est bien connue des éleveurs. Le chargement annuel caractérise le niveau d’intensification de l’élevage.

 

Physiologie des graminées
 

QUALITE DES FOURRAGES

Quelle que soit la composition de la prairie, la meilleure valeur alimentaire est obtenue par une herbe jeune et feuillue.
La diminution de la valeur alimentaire est graduelle. Elle est liée à l’augmentation de la proportion des tissus lignifiés et sénescents. Pour les graminées, elle s’accélère après l’apparition des épis.
À la floraison, une graminée a ainsi perdu la moitié de sa valeur alimentaire.
C’est donc cette herbe jeune et feuillue, appétente et très digestible, riche en sucre et en matières azotées qu’il faut privilégier par des modes d’exploitation adaptés.

 

Evolution PDI ECA et trèfle blanc

Evolution PDI ECA et trèfle blanc

En association, la légumineuse garantit la présence de protéines dans les fourrages récoltés.
Les différentes phases de pousse sont atteintes à des stades très variables, selon les secteurs géographiques, l’altitude, les années et les espèces prairiales.
La somme des températures est un indicateur efficace pour évaluer les fenêtres d’action pour la fauche des prairies.

Températures

LE PATURAGE

Différents types de paturages

Il existe différentes techniques de pâturage : le pâturage libre et le pâturage tournant ;

 

Pâturage libre extensif

Les animaux sont affectés à un espace de prairie qui doit assurer leur alimentation pendant une période relativement longue.
Ce système de pâturage est peu efficace si on évalue la productivité par animal ou par ha mais assure une robustesse face aux aléas climatiques.
La qualité de l’herbe offerte est satisfaisante sur une courte période au printemps (de 1 à 2 mois).
Sur la même parcelle, on peut observer tout à la fois des zones de surpâturage et de sous-pâturage car l’animal exprime des préférences.
 

Pâturage libre intensif (Continue, "Full Grass")

Le système de pâturage continu est basé sur la même organisation parcellaire que celle décrite précédemment. Il repose sur une adéquation parfaite entre l’offre d’herbe et les besoins du troupeau.
L’objectif est de maximiser la valorisation de l’herbe de la prairie tout en minimisant les excédents et l’apparition de refus. En principe, quotidiennement, le troupeau vit sur la croissance de l’herbe du jour. Si tel est le cas, l’état du couvert végétal et notamment sa hauteur reste stable (optimisation de la valeur alimentaire).
L’éleveur doit s‘assurer régulièrement de la cohérence offre-demande par des mesures de hauteur d’herbe et l’évaluation du stock disponible.
Ce système de pâturage nécessite un contexte pédoclimatique favorable (réserves hydriques, températures…) ainsi qu’une bonne fourniture en eau et en éléments nutritifs pour une croissance soutenue de la prairie.

 

Pâturage tournant (Rationnée ou fil avant fil arrière)

Le pâturage tournant est à l’heure actuelle considéré comme la technique la plus évoluée et aussi la plus adaptée pour exploiter au mieux un espace herbagé par un groupe d’animaux.
Son principe réside dans la subdivision d’un territoire à pâturer en paddocks qui permettent ainsi la phase de croissance ou de production de l’herbe et la phase de consommation par les animaux. On aboutit ainsi à la circulation des animaux sur les parcelles de prairie successives, d’où le terme « pâturage tournant »
L’objectif est d’offrir aux animaux une herbe de bonne valeur nutritive et de limiter les refus afin de valoriser au mieux l’herbe produite.
La technique du pâturage rationné consiste à déplacer quotidiennement au sein d’une parcelle une clôture, souvent un fil électrique, afin de délimiter une surface qui correspond à la demande journalière du troupeau. Pour maximiser le rendement, il est possible de mettre en place un « fil arrière » afin d’empêcher les animaux de consommer les jeunes repousses. Le reste de la parcelle, comme toutes les autres, poursuit sa croissance en l’absence d’animaux.
L’organisation du pâturage cloisonné repose sur deux fondamentaux, le cloisonnement de la surface totale nécessaire au troupeau et la maîtrise de la hauteur d’herbe à l’entrée et à la sortie du pâturage.
Différents niveaux d’intensification du pâturage tournant existent.

Pâturage tournant simplifié 

Le parcellaire est divisé en paddocks peu nombreux et de surface plus importante. Les animaux séjournent une dizaine de jours par parcelle. Cette technique permet plus de flexibilité au niveau de la gestion du pâturage, et diminue les coûts d’aménagement (clôture, chemins, eau…).

Pâturage tournant dynamique 

Découpage parcellaire suivant le type de pâturage

Découpage suivant le type de pâturage

 

 

Découpage suivant le type de pâturage

COMMENT GERER SON PATURAGE

Bien faire pâturer, c’est prendre les bonnes décisions au bon moment concernant : le démarrage de la saison du pâturage l’entrée des animaux sur les parcelles la sortie des animaux de la prairie
Prenez l’habitude de parcourir régulièrement vos prairies et vous ferez rapidement vos repères. Vous pouvez également utiliser un herbomètre qui mesure la hauteur de l’herbe et propose les interventions à mettre en place.
Bon à savoir : 1 cm d’herbe fraîche = 200 à 250 kg MS/ha

 

Anticipez votre mise à l’herbe

La mise à l’herbe doit se faire de façon précoce, avant que l’herbe n’atteigne les 8 cm de hauteur.
La rotation doit ensuite se faire très rapidement. Si vous attendez d’avoir une hauteur « correcte » d’herbe sur la première parcelle, vous allez vous faire dépasser par la pousse. Dès lors, vous ferez pâturer une herbe trop haute qui sera mal valorisée par vos animaux, il y aura des refus et donc une perte d’une partie de l’herbe produite ! 
10 cm d’herbe : faites entrer vos animaux
5 cm : il faut sortir de la parcelle
Si vous faites pâturer en dessous de cette hauteur, la plante mettra plus de temps à repartir, car elle devra auparavant fabriquer des feuilles pour optimiser la photosynthèse. Une hauteur inférieure à 5 cm est également critique dans la gestion du parasitisme.
15 cm : réservez pour la fauche
À cette hauteur, l’herbe sera de moindre qualité et très mal pâturée, créant ainsi des refus et l’obligation de les broyer

 

Prévoir l’exploitation des prairies

La surface de pâturage est à ajuster en cours de saison selon la disponibilité en herbe. Au printemps notamment, les surplus d’herbe non pâturée seront débrayés. En été, on doublera la surface pâturée de printemps.
Une pâture précoce des surfaces destinées à la fauche (déprimage) permettra d’étaler la période de pâturage et d’optimiser la qualité du futur fourrage. Cependant, ce pâturage précoce sélectionne les épis à la base de la tige, ce qui favorise des repousses feuillues et de qualité, au détriment de la quantité.
De la même façon, il convient de prévoir les parcelles réservées à la fauche selon leur mode d’exploitation : une fauche précoce (ensilage, enrubannage) favorise une repousse importante et de qualité, pâturable dès le mois de juin.

 

Prévoir les stocks fourragers à récolter

Pour un système autonome : 

  • En bovins viande, on préconise de stocker 15 kg de MS de foin / UGB / jour, soit 35 à 50 ares / UGB en 1recoupe pour un hiver de 150 jours.
  • En bovins lait, apporter 2 à 3 kg de MS / EVL*/ jour en foin appétent et de bonne qualité toute l’année.

*EVL = Équivalent Vaches Laitières

Quelques repères techniques pour le pâturage tournant selon différentes espèces animales
 

En résumé

Parmi les différentes techniques de pâturage, l’éleveur choisira celle qui répond le mieux à ses objectifs, tout en minimisant les contraintes.
Le chargement à l’herbe est un indicateur précieux à connaître sur l’exploitation.
Prévoir sa campagne d’herbe est un gage de réussite, même si tout ne se passe jamais comme prévu, il faut toujours anticiper et s’adapter au plus vite.
Bien gérer l’herbe avec un pâturage tournant permet d’offrir de l’herbe de bonne qualité et d’obtenir des performances à moindre coût.
La gestion du pâturage est aussi un atout majeur pour renforcer l’autonomie fourragère des élevages et diminuer les coûts de production.
 

FAUCHE D’UNE PRAIRIE

TYPE DE CONSERVATION DES FOURRAGES

La conservation des fourrages récoltés se pratique de 2 façons : 

  • La voie humide : La stabilisation du fourrage n’est obtenue que s’il y a anaérobie (l’absence d’oxygène supprime les bactéries et les moisissures aérobies) et une acidité suffisante pour empêcher la fermentation butyrique, elle-même anaérobie.
  • La voie sèche : le plus souvent par fenaison, qui consiste à amener le fourrage à une teneur en matière sèche (MS) supérieure ou égale à 85%. À cette teneur la plante est morte et le développement des moisissures devient impossible car celles-ci ne disposent plus suffisamment d’eau pour se développer.


Les différentes techniques de stockages sur l'échelle de MS 

 

Différentes techniques de stockages

 

 

 

 

 

Le préfanage permet, en partie, de moduler la teneur en matière sèche.

Nombre de jours de préfanage en fonction du rendement, des espèces, des conditions météorologiques et de la technique de stockage (hors fanage)

 

Nombre de jours de préfanage

 

 

 

 

 

Cas de l'ensilage 

 

Cas de l'ensilage

QUAND FAUCHER SA PRAIRIE ET RECOLTER LES FOURRAGES? 

Faut-il faucher sa prairie le matin ou le soir ?

 

Quand faucher sa prairie

 

 

 

Après la fauche, la plante continue de respirer (utilisation des sucres) tant que son humidité dépasse 40%. Pour limiter les pertes, il est important de sécher rapidement le fourrage.
Ainsi les pertes des sucres par la respiration pendant la nuit sont plus grandes que les gains dus à la photosynthèse accumulée durant l’après-midi.
Pour les espèces à faible teneur en sucres, si le climat est propice au séchage pendant la nuit, il peut être intéressant de faucher l’après-midi car la teneur en sucre est maximale ce qui est intéressant pour la valeur du fourrage ou pour la conservation en ensilage.

Conditions de réussite de la fauche :

  • Fenêtre de beau temps suffisamment longue
  • Hauteur de 6/7 cm pour favoriser le séchage et la repousse
  • Fauche le matin après la levée de la rosée pour limiter les pertes dues à la respiration
  • Fauche en début d’épiaison pour un meilleur équilibre qualité/rendement

 

ENSILAGE

La réussite de l’ensilage dépend de deux conditions :

  1. La mise en anaérobie rapide de façon à limiter les pertes de sucres par la respiration. Pour cela, le silo doit être rempli et fermé rapidement et le plus hermétiquement possible.
  2. La descente du pH (<4) le plus rapidement possible, de façon à arrêter l’action des protéases végétales et des coliformes qui transforment les protéines et les sucres. Il est plus facile d’ensiler des espèces avec un taux important de sucre soluble (permet la diminution du pH).

Conditions pour obtenir un ensilage de qualité :

  • Une récolte sur un stade précoce
  • Un préfanage suffisant : 28 à 35% de MS
  • Un hachage fin (1 cm)
  • Le silo doit être rempli et fermé immédiatement de façon hermétique
  • La qualité du tassement doit être soignée
  • La qualité maximale peut être obtenue par l’utilisation de conservateurs (acides et/ou ferments lactiques)

 

ENRUBANNAGE DES FOURRAGES 

Réussir la conservation de son enrubannage dépend de :

  • La teneur en matière sèche : la qualité de conservation augmente avec la teneur en matière sèche. Cette dernière doit atteindre au moins 45% pour que la qualité de conservation soit bonne.
  • L’étanchéité du film plastique étirable, ce qui suppose qu’il soit de bonne qualité et bien posé, afin d’éviter le développement des moisissures.

Conditions pour obtenir un enrubannage de qualité :

  • Un préfanage suffisant 
  • 45 à 55% de MS
  • Un fourrage riche en sucres
  • Un fourrage sain
  • Une bonne étanchéité du film plastique
  • Un stockage vertical des balles

 

FENAISON DU FOURRAGE

Réussir sa fenaison
Suivant la teneur en MS de départ, de 2 à 5 kg d’eau sont à évaporer par kg de MS de fourrage vert pour le transformer en foin.
Au départ, la dessiccation est rapide car les stomates restent ouverts et parce qu’une partie (les 2/3 environ) de l’eau des tiges migre vers les feuilles qui se dessèchent plus vite. Ensuite, elle est lente car l’eau doit être perdue à travers la cuticule dont la partie extérieure cireuse est très imperméable.

Conditions pour obtenir un foin de qualité : 

  • Un fanage suffisant : 80 à 85% de MS
  • Réduire au minimum le temps de séjour au champ
  • Préserver les feuilles, riches en azote, lors du fanage (surtout pour les légumineuses)
  • Faucher des prairies propres et à hauteur minimum de 6 à 7 cm

 

SECHAGE EN GRANGE

Fauche et conditionnement
Le conditionnement du fourrage est une opération indispensable pour favoriser la dessiccation des tiges qui se dessèchent plus lentement que le reste de la plante. Les outils sont les mêmes que ceux utilisés pour le séchage au sol. Ces opérations s’exercent sur un fourrage vert ou encore très chargé d’eau, les nuisances des opérations mécaniques seront alors réduites.

L’estimation de la teneur en eau peut être faite naturellement

 

Humidité

RECOLTE ET TRANSPORT

La récolte du foin humide est réalisée avec des remorques « autochargeuses » qui vont ramasser et hacher le fourrage.
L’objectif est d’engranger un fourrage dont la longueur des brins est de 15 à 25 cm.


Stockage et séchage
Le foin est stocké dans un bâtiment, souvent subdivisé en plusieurs modules. Ce bâtiment est équipé pour sécher, stocker ainsi que pour charger les aires de ventilation et distribuer le foin aux animaux.

Schéma du principe du séchage en grange avec capteur solaire
Principe de séchage en grange

Atouts du séchage en grange

  • Foin de haute qualité (haute valeur nutritive, odeur, pas de poussière, pas de moisissures ni de germes butyriques)
  • Plus riche en protéines
  • Moins de travail, moins de main-d’œuvre
  • Moins de déchets : ficelles, films et bâches plastiques, pas de rejets polluants (jus d’ensilage), pas d’odeur
  • Permet de récolter l’herbe de façon précoce
Coûts comparés des différents chantiers de récolte

L’ensilage par automotrice est la solution la moins onéreuse sans prendre en compte le coût de la main-d’œuvre.
L’enrubannage s’avère plus cher du fait d’un nombre d’interventions plus important.
Le coût des chantiers de foin est semblable à celui d’un ensilage par automotrice.
L’ensilage par auto-chargeuse présente un coût intermédiaire entre l’ensilage classique et l’enrubannage.